jeudi 2 février 2012

Critique nouvelle : Cordes, Santiago Eximeno

Critique d'une nouvelle 
Cordes
Santiago Eximeno
Black Mamba n°20

L'auteur Santiago Eximeno a eu la gentillesse de passer lire ma critique générale de la revue Black Mamba. Chroniquer une revue comportant de multiples nouvelles étant un exercice très général, je n'ai pu me pencher plus amplement sur sa nouvelle dans celle-ci. Je lui ai donc proposer de travailler à nouveau sur sa participation. 
Voici, c'est chose faite... 

Cordes est une nouvelle illustrée par Aoulad et écrite par Santiago Eximeno, elle se trouve alternée entre des bandes dessinées courtes dans la revue Black Mamba que j'ai reçu grâce au partenariat entre la maison Céléphaïs et le forum le sanctuaire de la lecture des A&M. Il s'agit d'un récit de vie, ou plutôt tranche de vie d'une famille contemporaine, qui se trouve face à l'engouement pour un nouveau gadget qui fait fureur. Une boîte métallique de laquelle s'échappe une corde magique. Tout le monde rêve d'en avoir une, mais...si ces cordes, contre toute attente, les éloignaient de leurs proches? 

Je place Cordes dans un contexte merveilleux. Merveilleux et à la fois contemporain ! Car les personnages vivent dans notre société(télévision, média, forces de l'ordre...) mais que le thème du récit est la magie. La citation précédent la nouvelle l'instaure dès le début :"Je vis pour la première fois les tapis dans cours arrière d'autres voisins." extraite de Flying Carpets, de Steven Millhauser. On devine les tapis volants qui se rependent dans le récit de Millhauser... Comme les cordes vont se rependre dans le quartier du narrateur et dans le récit de la nouvelle. Des gadgets magiques que tout le monde rêve d'avoir. D'abord présentées dans une publicité à la télévision, comme l'objet indispensable, attirant les convoitises, qui changent la vie de son propriétaire. Mais on ne sait pas le prix de cette corde, qui sort du cube métallique pour se dresser vers le ciel. 
Sont-elles douées d'une âme, ou d'un mécanisme ingénieux, pour pouvoir bouger ainsi comme si elles étaient vivantes? Des questions qu'ici les personnages ne se posent pas ! Ils LEUR faut le gadget à la mode, et peu importe sa nature, ses secrets, ce n'est pas la question. Les cordes bougent, vivent, et ce n'est pas étonnant.


Mais c'est la fascination qui s'installent lorsque les cordes apparaissent dans le quartier. Le premier homme qui en possède une s'est posté dans le parc et, dressé sur sa code, s'y est installé pour lire un livre, impassible face aux exclamations interrogatives et exclamatives de ceux qui l'entourent. Comment est-ce possible? Encore une fois le narrateur ne se pose pas la question, mais il est fasciné par l'idée de connaître la sensation d'en posséder une. Et lorsque son meilleur ami en a une, la jalousie commence à le prendre, et lorsque tous ses voisins en possèdent une et vont se poster dans le parc, tous juchés sur leurs cordes, l'admiration fait place à la stupeur face à ce paysage étrange. Impossible de voler, ou d'essayer la corde d'un autre, car elle ne réagit qu'au toucher de son propriétaire. 
Mais à l'instant où c'est son père qui s'en achète une, tout bascule dans la vie du narrateur. Dès qu'il rentre du travail il rejoint les autres personnes juchées sur leurs cordes, dans leur monde, à discuter, lire ou faire des mots croisés. Leur vie de famille bascule alors. Ensuite s'ensuivent des disparitions de partout... ont-elles un rapport avec les cordes, alors que chaque famille en a une à son domicile maintenant? 

Dans ce récit, plus que le suspens, c'est l'interrogation mêlée à la jalousie qui prédominent. Tout du long, on se demande ce qu'ont ces cordes de si spécial, pourquoi elles créent tant d'engouement, et comment elles peuvent fonctionner. Mais c'est ce que ressent aussi le narrateur sans doute, tiraillé par l'envie de connaître l'expérience que vivent tous ses voisins qui l'entourent, ainsi que son meilleur ami. Il se pose des tonnes de questions mais il est surtout très jaloux, après avoir été peu de temps admiratif face aux capacités de cet objet. Une jalousie presque palpable lorsque son ami lui montre sa corde, puis lorsqu'il rejoint leurs voisins dans le ciel, juchés sur leurs cordes, et enfin lorsque c'est son propre père qui rejoint ce manège étrange. 
Le narrateur est exclu parce que son père ne lui a pas offert le gadget à la mode et que lui en profite... 
Parce qu'il ne vit pas les mêmes expériences que toutes ces familles de part le monde qui en profitent. Ces cordes qui changent leur vie, comme il est dit à la télévision. 

Une atmosphère étrange, presque malsaine, renforcée par les illustrations en noir et blanc de Aoulad. Car le monde du narrateur est un monde noir et blanc, où lui est perdu dans le noir, triste, et les autres ont acquis une certaine conscience de l'âme, qu'ils partagent, et sont comme dans un monde blanc de lumière. Ou alors est-ce le narrateur qui reste dans la lumière, alors que tous ces adeptes de cordes se perdent dans le noir ? S'éloignant de leurs familles et de l'essentiel. Dans tous les cas, c'est un monde gris qui envahit le quotidien. Triste et douloureux, où la vie est en suspens, comme le possesseur de corde juché sur son gadget magique.

Alors qu'on ne connait pas le nom du jeune garçon narrateur, ni son âge, on en sait plus sur sa famille, car c'est la vie de famille qui est touchée dans ce récit. La mère aimante, le petit frère et le père joyeux... Ces moments simples auxquels il ne pourra bientôt plus assister à cause de cette maudite corde. Une famille qui va s'étioler, des personnes qui vont oublier leurs responsabilités et d'autres se dévoiler... Mais une famille qui restera unie, existant jusqu'au bout dans cette attente interminable, cette vie suspendue. 

Cordes est un récit qui peut être lu par tous et toutes, qui n'est pas effrayant, mais pour lequel il faut accepter le marché : être suspendu un instant dans sa vie et son quotidien, le temps de suivre l'auteur dans son récit, et son écriture qui pend les questions à nos lèvres, et fait ralentir les minutes, la trotteuse dans l'horloge. Tout s'arrête et le lent questionnement nous prend. La langueur si bien décrite, autant dans l'envie d'avoir une corde, que dans le besoin qu'elles disparaissent toutes. Une fin libératrice, quelques derniers paragraphes qui vont soulager pour nous entraîner un dernier instant dans le fantastique. Un changement de registre en effet pour clore le récit, où l'on passe du merveilleux au fantastique, et même à la Science Fiction à en croire l'illustrateur. Un dernier bon en avant, dans un futur récit, qui commence, comme tout synopsis, par un chamboulement de questions incessantes. 

Il s'agit donc d'un récit prenant. Court mais haletant. Facile à l'ire mais entraînant dans un suspension. Un instant loin de tout, où les quelques pages nous emportent dans l'univers merveilleux de ces cordes magiques. 

3 commentaires:

  1. Ca n'a pas du être très facile de réaliser une chronique sur une seule nouvelle non ?

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  2. :O Excuse me, but I only speak a little bit of french. Thank you for your review of "Strings".

    :O Discúlpame, pero apenas hablo francés. Muchas gracias por tu reseña de "Cuerdas".

    In french: "M-E-R-C-I" :)

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  3. Ange : Non pas facile du tout !
    Mais comme je n'ai fait que 2 lignes à peine sur chaque nouvelle, pour moi c'était évident qu'un travail plus poussé pouvait être fait ! Je trouve ça plus pro et sympa, qu'en penses-tu ?
    Par contre oui, j'ai bien galéré ;) Surtout que malgré mon résumé, je n'ai pas dévoilé la 2ème moitié et la fin ^^

    Santiago : "Zuuuuut !"
    Un amigo puede traducir la ?
    Disculpa, me gusta el español, pero no lo habia hablando desde dos años :(
    De nada, trabajar adémas mi reseña de Cuerdas fue un regal :D

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